Le contexte agricole au Maroc
Au cours de nos trois semaines passées au Maroc, nous avons plusieurs fois arpenté les couloirs des chambres (instances provinciales) et des directions régionales de l’agriculture marocaine. Toujours très bien accueillis, nous avons petit à petit découvert le contexte agricole au Maroc. Lancé il y a 5 ans, en avril 2008, le plan Maroc Vert détermine désormais les orientations agricoles du pays, suivant deux piliers :
– pilier I : le développement d’une agriculture moderne et à haute valeur ajoutée/haute productivité. Cet axe s’appuie surtout sur les investissements privés et s’articule autour du concept d’agrégation.
EXEMPLE : l’installation d’une unité de trituration d’huile d’olive. Un investisseur privé (l’agrégateur) présente son projet à l’Etat marocain. Une fois validé, l’agrégateur va contacter des petits agriculteurs (les agrégés), acheter leur production d’olives selon un contrat bien défini (incluant souvent la mise en place d’avances, permettant aux petits producteurs d’acheter des intrants phytosanitaires notamment), et utiliser son unité de trituration pour produrie sa propre huile d’olive. L’Etat n’intervient pas dans l’établissement du contrat, qui se veut gagnant-gagnant
– pilier II : l’accompagnement solidaire de la petite agriculture, basé sur des investissements étatiques.
EXEMPLE : l’installation d’une unité de trituration d’huile d’olive. L’initiative revient aux agriculteurs qui doivent d’abord se réunir au sein d’une organisation professionnelle (OP) puis déposer leur demande. S’il juge l’OP sérieuse et le projet justifié, l’Etat finance alors la construction de l’unité de trituration et la met à disposition de l’OP sans autre condition.
Sans rentrer plus dans les détails officiels (que vous trouverez aisément sur internet), quelles sont les implications de ce plan Maroc Vert ? Le Maroc s’oriente clairement vers l’intensification de ses terres agricoles : c’est semble-t-il le but premier de ce système d’agrégation. Et malgré le pilier II, un de nos interlocuteurs au sein même de l’administration nous a confié que le plan Maroc Vert ne se souciait pas assez des petits agriculteurs, pourtant largement majoritaires : 80% des paysans marocains ont une surface agricole inférieure à 5 ha…
Dans ce contexte d’intensification et contre toute attente, la chance nous a mis sur la route de Saytlia, la ferme biologique de Mohamed Zouhair et Irène Nicotra. Ils cultivent bien entendu leur terre sans produit chimique, mais surtout, ils le font avec passion et conscience. Toute une éthique de vie gravite autour de cette ferme. C’est ce qui la rend si rare. C’est ce qui nous a conquis et convaincus de vous en parler.
Saytlia, la ferme biologique
LA GENÈSE DE LA FERME
En 2000, Mohamed (docteur en climatologie) et Irène (traductrice) décident de quitter Paris pour aller s’installer au Maroc. Mohamed n’aspire alors qu’à une chose : revaloriser la terre que lui a légué son père, située à 50km de Rabat. Il pense d’abord à planter des arbres, des oliviers, pour protéger la partie fragile de son terrain contre l’érosion. D’autres arbres fruitiers viennent petit à petit compléter le verger et un potager voit le jour… Au début, Mohamed ne tire de la terre que de quoi nourrir sa famille et ses amis, mais en juin 2010, poussés par la crise financière et l’insistance de leur entourage, lui et Irène commencent à vendre.
Notre reportage vidéo : « Saytlia, la source de l’agriculture biologique »
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