Ride The Flavour (fr)

De la pureté d’une ferme à la pollution d’un pays

Juil. 2nd | 4 commentaires

Cette newsletter s’est sûrement faite un peu attendre, et je ne vois à ce retard qu’une seule explication, un unique coupable : la montagne. Ce dernier mois, mon corps et mon esprit ont vécu prisonniers de la montagne. Prisonniers, et pourtant plus libres qu’ils ne l’avaient été depuis leur arrivée en Inde… Mais ceci est une autre histoire. Pour le moment, veuillez la pardonner (ma situation était tout à faire involontaire, vous l’aurez compris !) et revenons en arrière. Revenons un peu plus d’un mois en arrière, revenons au lundi 19 mai…

Lundi 19 mai. C’est le jour du départ. C’est le moment de dire au-revoir à la famille Rana et au petit coin de paradis qu’ils habitent. Après cette semaine de WWOOFing (la description est complètement partielle mais cet article l’améliore considérablement !), après une semaine de sédentarité, la route m’appelle avec une insistance que je ne peux ignorer. Nous nous envoyons de dernières pensées, portées par de derniers gestes de la main, et quelques secondes plus tard mes roues retrouvent l’asphalte indien.

Comme à chaque fois que je reprends le vélo après une longue pause, un sourire irrésistible (« auquel je ne peux résister » / « auquel personne ne peut résister ») me vient au lèvres… Les retrouvailles avec la liberté et la perspective de nouvelles découvertes ont immanquablement cet effet !


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Je passe par Panthankot avant d’entrer dans un nouvel Etat : Jammu & Kashmir. J’arrive en début de soirée à Samba, quelque 40km à l’Est de Jammu, et décide de m’arrêter dans les environs pour la nuit. Quelques questions pendant que j’achète un « cold drink » m’apprennent qu’il y a un temple Hindou à 3km et qu’ils pourront certainement m’accueillir pour la nuit là-bas. Effectivement, le temple m’ouvre ses portes immédiatement : je peux y dormir, et j’aurai même le droit à un dîner !

Lorsque je remercie le responsable du temple de m’avoir accueilli ainsi, il me répond : « ne me remercie pas, remercie plutôt Dieu ». Ce qui a pour moi assez peu de sens. Son Dieu lui a peut-être soufflé cet acte de générosité, mais qui l’a accompli sinon lui-même ? Et puis, j’aurais bien du mal à remercier un Dieu hindou… Première énigme : « Quel Dieu remercier ? »


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Je sors mes affaires pour la nuit et vais ensuite aux sanitaires pour me débarbouiller. Triste constatation : les Indiens ne sont pas plus propres dans les lieux sacrés qu’ils ne le sont dans les lieux publiques. Âmes sensibles, passez au paragraphe suivant ; sur la dizaine de toilettes (à la turque évidemment), tous étaient repeints de traces de merde, parfois tout simplement une crotte était tombée à côté du trou. Bref, à ce moment-là, 1) j’ai regretté de ne pas être en camping sauvage, et 2) je n’ai pas refoulé mon mépris, né de l’incompréhension face à ce qui est pour moi un manque total de respect.

J’avais installé ma tente avant la nuit tombée, et lorsque j’y suis retourné pour me coucher, j’ai vu avec surprise que toute une rangée d’Indiens dormaient dans l’alignement, mais à même le sol… Intégration à la vie locale : 0 pointé. Mais la photo est drôle !


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Le lendemain, je décide de contourner Jammu et prendre la petite route qui va direct au Nord vers Udhampur. Les heures suivant cette décision sont rudes. La route a dû être goudronnée à un moment, mais je n’ai jamais vu un goudron dans cet état-là. Ça monte et ça descend. Et pour couronner le tout, il fait très très chaud. Tous les ingrédients sont là, le tour de magie est réussi, je me transforme immédiatement en fontaine de sueur.

Après Udhampur, je retrouve la route principale. Avantage : la route est presque bien goudronnée. Inconvénient : le ballet des camions reprend, camions de marchandises et camions militaires quasiment en égale proportion (impressionnant). Il ne se passe pas une minute sans qu’un poids lourd ne me double, lentement, et injecte 5 secondes de fumée noire dégueulasse directement dans mes narines. Sans parler du bruit des moteurs et des klaxons. Je suis entré dans les montagnes, mais pédaler reste loin d’être agréable…


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Les bergers et leurs troupeaux le long de la route sont les seuls à me faire réellement sourire. Les moutons se perdent dans leurs rêveries, les chèvres s’écartent pour atteindre les feuilles les plus hautes des arbres les plus éloignés, et les bergers gesticulent et sifflent sans arrêt pour les ramener à l’ordre. Et ces spectacles réguliers non seulement me rendent le sourire, mais créent en plus de beaux embouteillages qui m’assurent quelques minutes sans fumée d’échappement !


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Heureusement, on ne souffre l’obscurité que pour mieux apprécier la lumière. Heureusement, vers 18h j’ai quitté la route et ses gaz d’échappement et trouvé un coin (presque) parfait pour camper. La route n’est pas loin, elle est même toute proche, mais je suis au milieu des arbres. Un ruisseau coule à deux pas, il est boueux et pollué de détritus, mais je peux en filtrer l’eau, la boire et cuisiner. Et surtout, quel bonheur d’être seul ! Quel bonheur de ne pas avoir à répondre aux sourires et questions (toujours les mêmes) de tous ceux que je croise. Ce n’est pas la nature la plus pure, mais la solitude me manquait. Quiétude.


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Le ballet des camions reprend. J’arrive à Patnitop. Derrière, la route redescend. Elle est pourrie, la poussière m’envahit les narines dès que je croise un camion, mais au moins plus aucun ne me dépasse. C’est même plutôt le contraire 🙂 Et certaines portions parviennent même à m’envoyer dans le présent ! Je slalome entre les trous et les camions, parfois seulement je lève les yeux pour sourire aux militaires qui me sifflent avec un pouce en l’air, mais mon regard reprend vite la route. Mon concentration est extrême, et elle est fixée sur un point unique : la joie de l’instant, la joie du présent.

J’arrive ensuite à Jawahar Tunnel, 2,5km d’un glauque digne d’un roman policier. Une lumière blafarde, parfois inexistante. De l’eau qui percole à travers la roche dans un goutte-à-goutte régulier, parfois une pluie gelée. La traversée est définitivement des plus oppressantes…

Mais de l’autre côté du tunnel s’ouvre la vallée du Kashmir !


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A suivre…

4 comments Ajouter un comentaire

  1. Retrouvailles familiales dimanche chez Mamique pour fêter l’arrivée d’Antoine, Muriel et Léon ! il manquait les Clément mais vous êtes un peu avec nous grâce à internet et c’est toujours super de te lire et de découvrir le monde avec toi ! Bonne route indienne et à bientôt ; Flavie


  2. ça donne envie, mais cette pollution est terrible


  3. après les belles photos le commentaire toujours intéressant à lire.merci Damien et maintenant bonne continuation à Belgrade avec le petit Samuel bises JP


  4. Toujours très intéressée par ton fabuleux parcours même si j’ai raté quelques épisodes. J’espère qu’à ton retour, tous ces souvenirs pourront être immortalisés dans un livre…….ça vaudrait la peine !
    Si tu es au courant de  » Muco 2014″, j’espère que tu peux pédaler pour Basile…..il faut viser 70 000 kilomètres !……..Basile et tous les Petits Mucos apprécieront ton aide !
    Bonne route. Je t’embrasse
    Sophie


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